vendredi 31 décembre 2010

Un peu de poésie... (5) ...pour que 2011 s'installe en beauté

c’est de toi qu’il parlait en qualifiant tes yeux absinthes
dans un temps à rebours – ô ma mie
toi qui promène ton regard de fée verte sur ce passé révolu
lieu où gisent les mânes tant espérés

pleurons ensemble ces disparus
en un poème sensé dans un monde insensé
en des vers significatifs à travers une époque déconstruite
et faisons comme ces décédés – révoltons-nous
d’un héroïsme sanglant contre le non-sens

c’est de ton esprit que surgit le goût du rétablissement
de la reconstruction impossible
divaguant sur l’insondable
alors que tous braquent sur nous des yeux rouges et noirs
qui n’ont rien à voir avec toi et ton regard absent

m’en veux-tu – toi qui n’a ouï dire
de la bouche d’un lâche enivré de volutes
qui se martèle à fond le crâne de son poing
de cette main habile qui pianote pour toi

ô ma mie – m’en veux-tu de t’idéaliser
moi rêveur impromptu
lâche
abattu dans le puits
là où gisent les fous dans l’instant lunaire

qu’importe – pleurons ensemble
en un poème de moins en moins sensé
et rions à travers les abstractions qui nous rappellent
ceux qui nous envoûtent – y compris celui qui t’a si bien qualifié
toi aux iris absinthes

samedi 25 décembre 2010

vendredi 17 décembre 2010

En ces temps de festivités...

Les contraintes sont enfin suspendues jusqu'en début janvier, outre que nous entamons actuellement la période de l'année où les soirées sont les plus longues, ce qui est plutôt réjouissant lorsqu'on a mille projets en tête. J'en profite donc pour me mettre à l'ouvrage en matière d'écriture, de même que pour passer en revue ce qui a été pondu au cours de la dernière année : quelques nouvelles, deux projets de plus grande envergure, près de 30 poèmes, plusieurs critiques et articles... Certains de ces textes sont parus ici et là, d'autres non pour diverses raisons : inachevés, à peaufiner, à relire (après un premier jet, j'ai tendance à attendre quelques semaines, voire quelques mois pour porter un regard nouveau sur ce qui a été rédigé).
Bref, c'est avec une certaine fierté que je considère cette petite production, bien que le tout soit discret et que les publications se fassent rares. D'ailleurs, je me demande par moments si ce n'est pas moi qui fonctionne au ralenti ; car, comme je l'ai écrit il y a quelque temps dans un commentaire perdu dans les tréfonds de la blogosphère, à force de constater à quelle cadence certains publient au fil des mois, j'en viens à développer le complexe de la lenteur. Or, malgré ces quelques interrogations qui surgissent de temps à autre, la même réponse s'impose toujours : à chacun son rythme...


lundi 22 novembre 2010

Un peu de poésie... (4)


alors que tu prononçais des gouffres

sous tes ruisseaux vides et teintés

d’un ciel mélancolique

d’un ouragan blasé

il vivait d’un ouvrage acharné

d’un mirage infesté

noir


parce que tu chantais de ta voix éraillée

des sons de scies tranchantes

des mots alcoolisés

il tournait dans son antre à travers les sirènes


sous l’impulsion de ton triste cynisme

gravant l’amertume à même ta peau

d’un sol putréfié

d’humus virevoltant dans l’encens de la mer

il riait dans ses histoires morbides

de nuages scabreux

noirs


en raison de ton parfum grisant

serpentant dans l’esprit de ceux qui n’ont rien à perdre

rien à espérer

il vomissait sa vie en une flaque amère

dimanche 21 novembre 2010

Vaste salon et sombre cabaret

En cette fin de session bien remplie, alors que je m'efforce de ne pas mettre de côté le défi du Nanowrimo dont l'objectif final ne sera guère atteint en ce qui me concerne, je suis allé faire une brève visite au Salon du livre de Montréal ce samedi soir. Il est toujours étonnant de constater que dans un espace si vaste où tant d'amateurs de livres se rassemblent, sans compter les multiples ouvrages qui abondent dans les kiosques, il est étourdissant de se promener dans les rangées en revenant sans cesse sur ses pas à l'idée qu'on pourrait avoir manqué le kiosque qu'on cherchait. Il reste qu'il est toujours agréable d'assister à ce genre d'évènements, puisqu'on y fait la rencontre de gens qui ont tous les mêmes passions : l'écriture et la lecture. Durant ma brève visite, j'ai d'ailleurs eu l'occasion de socialiser avec des auteurs et éditeurs qui se reconnaitront sans doute s'ils passent par ici.

Dans un autre ordre d'idées, je suis récemment allé voir l'exposition Rouge Cabaret : le monde effroyable et beau d'Otto Dix. Après lecture de l'article de Philippe-Aubert, sans compter quelques amis qui m'ont vivement conseillé la visite, je ne pouvais faire autrement qu'aller constater de mes propres yeux les œuvres de ce peintre contemporain aux tonalités macabres.


Afin de mieux apprécier l'ampleur des toiles et des dessins d'Otto Dix, il s'avère indispensable de lire les descriptions historiques inscrites sur les murs selon la tradition du musée ; après quoi la contemplation des œuvres de ce dernier n'en est que plus bouleversante, Des scènes de guerre représentent des soldats morts, blessés, estropiés, défigurés, sans compter les anciens soldats qui sont dépeints comme indigents, mutilés et délaissés du monde. Il n'y a qu'à voir cette caricature d'une toile bien connue de Cézanne où des amputés jouent aux cartes en s'aidant de leurs prothèses pour rendre compte de tout l'aspect satirique que recèle la grande majorité des toiles de la période de l'entre-deux-guerres.


Le thème de la prostituée en est aussi un qu'affectionne particulièrement Otto Dix, qui s'est servi à maintes reprises de l'image de la veuve qui ne peut faire autrement que vendre son corps afin de survivre suite au décès du mari à la guerre. Il est à noter que les personnages sont tous peints d'une manière à la fois grotesque et détaillée, ce qui accentue la part d'humour noir omniprésent dans ces œuvres saisissantes marquées par le désespoir de l'être humain vis-à-vis ses semblables.


Pendant la Seconde Guerre mondiale, Otto Dix a eu quelques démêlés avec les autorités allemandes, que je ne décrirai pas ici en détail. Pour cette raison, il a en quelque sorte été contraint à délaisser son style noir et personnel pour se tourner davantage vers la peinture paysagère, ce qui ne l'a pourtant guère empêché de se livrer à la création de portraits. Et le plus surprenant, c'est que ceux-ci, bien qu'ils soient presque tous des commandes de proches et de connaissances diverses, sont tout aussi grossiers et satiriques que les œuvres précédentes (!). Par exemple, ce médecin au visage déformé par la mélancolie, de même qu'aux yeux verts et globuleux qui ressortent en sailli lorsqu'on se trouve face à la toile :


Pour conclure sur le sujet, il est difficile, voire impossible de quitter l'exposition dans un état d'indifférence, puisque chacune des toiles et chacun des dessins contiennent en eux-mêmes une part d'austérité entremêlée à une espèce de dévoilement de la nature autodestructrice de l'être humain qui ne peut que secouer celui même qui ne se laisse jamais émouvoir. Il n'est pour ainsi dire guère étonnant qu'Otto Dix ait réalisé de nombreux autoportraits le montrant rigide, froid, les yeux dévoilant un état d'esprit désabusé qui cherche sans cesse un échappatoire dans le domaine de l'art...


dimanche 7 novembre 2010

Nanowrimo et caféine

Cette année, j'ai décidé, comme certains l'ont sans doute remarqué, de participer au Nanowrimo. En fait, la décision a été prise en ce qui me concerne le 31 octobre dernier, soit un jour avant le début de ce défi colossal, qui consiste en l'écriture d'un roman de 50000 mots en l'espace d'un mois. Après une semaine d'écriture acharnée, je trouve le défi fort enrichissant, considérant qu'il s'avère souvent indispensable d'écrire de manière spontanée, que l'inspiration y soit ou non. Des idées nouvelles surgissent à certains moments, et des tournures inattendues modifient peu à peu le plan d'origine, le plus souvent pour le mieux. Et si parfois la motivation s'amenuise car il n'est pas toujours aisé de maintenir un rythme constant à une vitesse aussi rapide, l'épuisement prenant souvent le dessus il suffit d'écrire une phrase ou deux pour que l'élan surgisse à nouveau. Le café est également une option envisageable pour rédiger les quelques 1666 mots par jour requis pour réussir le défi ; après quoi le tout sera à retravailler, remodeler et réécrire, encore une fois en buvant des litres et des litres de café...

lundi 4 octobre 2010

Un peu de poésie... (3)


le poison
s’incruste

dans le réseau sanglant des vipères

là où périssent de multiples sirènes aux seins tranchés


le wagon-hivernal-ithylique-sidéral-kabbalistique-yttrifère ne cesse d’enchanter

la substance grise

l’ivoire fluide qui ravage les mondes sarcastiques

et les mondes masochistes

du rêveur qui glane

ici et là

sous les miasmes abstraits

sur les noires démences à la verge blanchie


les reptiles aux langues fourbues se noient

dans les eaux fortes et odorantes

sous le joug de la passion – de l’autodestruction

jeudi 30 septembre 2010

Un peu de poésie... (2)

Juste pour dire que j'ai publié six billets ce mois-ci...

Noir enfant des étoiles
au cœur catatonique à la tête historique
enjambe les jalons de bitume et de terre
d’un grand pas de géant de vermines et rubans

l’esprit aux milles rouages s’enflamme dans les sciences
de la gloire artistique – tac tic tac…
dansant à la santé des paons et des flutistes
sans égards pour les mondes éternels

le prisonnier des montres joue
au bout des chaînes et meurt au bout des astres
aux entrailles rougies de maniaques sourires
aux regards dépressifs entraînés par les flots
des moires horlogères sans pitié à l’égard des enfants étoilés

mercredi 29 septembre 2010

Une philosophie du dandysme


« Ce qui est vrai de l’art est vrai de la vie »

– Oscar Wilde


À force de vouloir percer le secret de l’être, la majorité des philosophes ont négligé le paraître. Pourtant, l’ensemble de ce qui constitue la réalité nous apparaît, puisque nous existons en cet instant même par le biais de la perception sensible. Sans la vue, l’ouïe et tous les autres sens connus à ce jour, la possibilité d’un monde existant s’évanouirait d’emblée. Mais il n’en est rien, puisque le monde existe, la raison étant que nous le percevons à travers notre faculté d’éprouver des sensations. Le paraître s’avère donc d’une importance primordiale en philosophie ; pour cette raison, il est tout à fait opportun de s’y pencher soigneusement afin de mieux cerner le rôle qu’il tient dans la vie d’un individu. Certains philosophes et artistes l’ont d’ailleurs fait avec un brio indéniable. La preuve en est que l’esthétique est devenue l’une des principales branches de la philosophie depuis Baumgarten, à qui l’on doit l’invention du terme. Sans compter que l’art du paraître est apparu vers le XVIIIe siècle sous le nom de « dandysme », qui peut être défini comme la doctrine de l’élégance, de la finesse et de l’originalité.

En quoi consiste au juste un dandy ? La définition ci-haut en donne une idée sommaire : c’est un individu qui s’efforce de bien paraître, c’est-à-dire de se vêtir avec une tenue appropriée ainsi qu’un soin raffiné, le tout accompagné d’une gestuelle maniérée, d’un langage soigné et d’une rhétorique maîtrisée. Il est manifeste qu’une telle pensée de l’élégance ne se limite en rien à la seule perception visuelle, puisqu’aux yeux du dandy, il s’avère aussi indispensable de posséder une juste connaissance de la langue parlée ainsi que d’être à même de créer des mots d’esprit à la fois comiques et spontanés. Il va sans dire que celui qui se plie à la doctrine du dandysme doit faire de terribles efforts pour y parvenir, la vie du dandy se rapprochant en cela d’une forme d’ascèse.



Des connaissances esthétiques profondes ainsi qu’une fine sensibilité s’avèrent donc indispensables pour évaluer les formes et les couleurs de manière spontanée tout en ayant pour unique base les passions illogiques du cœur et de l’esprit. Il suffit de mettre le pied hors de chez soi et de vagabonder à tâtons en société pour s’apercevoir que peu de gens possèdent un tel sens de l’esthétique. Le bon goût disparaît parmi les tee-shirts insipides aux logos variés et les blue-jeans qui se ressemblent tous et qui rendent compte d’une des principales craintes qui prédominent en société : celle de s’affirmer en tant qu’individu. Les occasions où nos yeux se hasardent sur une personne élégante au charme apaisant sont très rares. Et s’il est vrai que le dandysme fut jadis chose courante chez nombre d’intellectuels, notamment au XVIIIe et au XIXe siècle, les dandys sont quasi absents en ce XXIe siècle, où l’inélégance semble prisée avec une conscience assumée, ce qui relève d’un pathétisme à la fois triste et risible.



Ces modestes propos peuvent sembler offensants pour ceux qui n’accordent que peu d’importance à leur manière d’être et de paraître dans le monde. Il s’agit néanmoins d’un simple constat, d’une pensée peu développée, mise sur le papier de manière spontanée, dans l’instant. Loin de moi l’idée de reprocher aux gens leur manque de raffinement et de bon goût en matière de vêtements, ou encore de me moquer de leur ignorance de la langue parlée ! Ce n’est de toute manière qu’une simple question de goût, ce qui concerne l’indéterminé et l’immensurable. Et juger les goûts d’autrui par rapport aux siens propres n’est guère une activité prisée par le dandysme, doctrine qui se doit d’être distinguée de celle du snobisme…

Être dandy relève donc d’un choix individuel. C’est une forme d’apologie de l’individu par rapport à la société, qui tente d’absorber celui-ci afin de le fusionner avec autrui en un amas uniforme et abstrait. Or, il s’agit ici de mettre en avant-plan le monde concret, et, par conséquent, les perceptions sensibles qui permettent à l’individu d’exister. C’est en quelque sorte une louange à la beauté visuelle et sonore. Et pourquoi pas un éloge au bon goût en matière de boisson et de nourriture, des bonnes odeurs, du choix d’un encens au parfum extatique, et peut-être même des caresses agréables, prodiguées avec un soin tout particulier ?

J’en viens au point final : le paraître est tout, car ce qui est nous apparaît. Et si le dandysme demeure un choix individuel à caractère intellectuel, le paraître de l’être consiste quant à lui en une réalité nécessaire. C’est donc du côté des sens que les philosophes trouveront le fond même de l’existence. Quant au reste, il faut faire appel au langage…

jeudi 23 septembre 2010

Les vapeurs de l'existence


L’essence du monde se révèle sous l’aspect d’une immense toile aux couleurs variées qui s’embrasent en un pur effet de clair-obscur, tandis que l’existence correspond au modèle sur lequel les créateurs d’essences s’inspirent dans leurs folies abstraites. Il s’ensuit qu’il ne peut y avoir d’essence qu’à la suite d’une prise en compte de l’existence, celle-ci se révélant aux consciences créatrices dans toute sa nudité ainsi que sa fraicheur éternelle ; d’autant plus que l’existence, qui n’apparaît dans les faits que sous forme d'un perpétuel devenir, ne peut en aucun cas se réduire au statut d’essence, échappant sans cesse au langage qui tente en vain de la saisir en un effort désespéré.

Or, l’existence est et demeure ce qui est insaisissable, c’est-à-dire ce qui ne peut en aucune manière se traduire en langage ; et pourtant, elle est bien là, devant nos yeux, tel un mirage vaporeux qui s’estompe à mesure que nous tentons de l’approcher ; tel un idéal fallacieux qui arrache l’être humain à sa propre matérialité, le poussant à sévir cruellement contre lui-même. – Ai-je dit « être humain » ? Pour sonner plus juste, il serait préférable de le désigner sous l’appellation d’être tragique par excellence


samedi 18 septembre 2010

L'inconnu du Nord-Express


Au cours d’un voyage en train, Guy Haines rencontre par hasard Charles Anthony Bruno, un type aux idées morbides qui affirme éprouver une haine féroce envers son père. L’inconnu finit par lui proposer de tuer chacun de leur côté pour le compte de l’autre ; en effet, puisque les deux hommes n’ont aucun lien entre eux, hormis leur discussion à bord du train, il serait difficile, voire impossible pour la police de résoudre l’énigme cachée derrière les meurtres. Sur le coup, Guy ne prend guère son interlocuteur au sérieux, croyant qu’il lit simplement trop de romans policier. Mais les choses prennent une tournure cauchemardesque lorsqu’on lui apprend que sa femme, avec qui il s’apprêtait à divorcer, a été retrouvée morte dans un parc d’attraction…
L’inconnu du Nord-Express est le premier roman de Patricia Highsmith, et non le moindre. Dès sa parution en 1950, le fameux cinéaste Alfred Hitchcock a été si ravi par l’histoire qu’il en a fait une adaptation pour le cinéma l’année suivante (!). Tout au long du livre, l’intrigue tient en haleine le lecteur à travers un récit aux descriptions riches et aux dialogues fort bien construits. Le personnage de Charles Anthony Bruno est à lui seul un sujet de fascination pour les amateurs de récit aux teintes psychologiques, tant de par son attitude de dandy cynique qu’en raison de ses idées sombres et meurtrières.


Hormis un léger excédent de descriptions qui ne nuit en rien au roman, L’inconnu du Nord-Express possède un rythme bien équilibré qui permet de rendre à merveille l’effet de suspense escompté par celle qui affirmait détester plus que tout les romans policiers. Et pourtant, Highsmith débutait avec ce premier livre une carrière d’écrivain qui l’a rendue célèbre pour ses thrillers psychologiques, et surtout pour son personnage de Tom Ripley, qui verra le jour cinq ans plus tard…